A quelques semaines de l'annonce d'une commande géante d'avions long-courriers, la compagnie est priée de privilégier Airbus. Le secrétaire d'État au Commerce extérieur demande des explications au management.
La pression monte sur la direction d'Air France-KLM. 144 députés de tous bords ont signé la pétition lancée par Bernard Carayon,…
A quelques semaines de l'annonce d'une commande géante d'avions long-courriers, la compagnie est priée de privilégier Airbus. Le secrétaire d'État au Commerce extérieur demande des explications au management.
La pression monte sur la direction d'Air France-KLM. 144 députés de tous bords ont signé la pétition lancée par Bernard Carayon,…
le député UMP du Tarn, pour inciter Air France à privilégier Airbus dans le cadre d'une mégacommande d'avions long-courriers. Mardi, Pierre Lellouche, le secrétaire d'État au Commerce extérieur, a annoncé son intention de rencontrer Pierre-Henri Gourgeon, le directeur général d'Air France-KLM, pour demander des «explications» sur ses intentions d'achat. La rencontre doit avoir lieu cet après-midi.
Pour le gouvernement, les mauvais chiffres du commerce extérieur – qui s'est creusé à plus de 7 milliards d'euros en avril – ont sonné comme un sévère rappel à l'ordre. En particulier pour les entreprises dont l'État est actionnaire. Chez Air France-KLM, il ne détient «que 15 %» du capital. Mais Pierre Lellouche estime que la compagnie peut «renvoyer la balle» à un État qui a «beaucoup aidé» le groupe «quand il avait des problèmes avec Bruxelles». Une démarche similaire au rappel à l'ordre intimé la semaine dernière à PSA Peugeot Citroën, après la révélation de son éventuelle intention de fermer deux usines en France. PSA n'est pas une entreprise publique, mais il a bénéficié de crédits d'État pendant la crise.
Choix stratégique
La pression politique mise sur Air France est à la mesure de l'enjeu : une mégacommande – la première faite en commun par Air France et KLM – d'une centaine d'avions long-courriers. Le projet est qualifié d'historique par les dirigeants d'Air France-KLM eux-mêmes : elle devrait se chiffrer en dizaines de milliards de dollars. Le verdict de la direction de la compagnie aurait dû tomber peu après l'assemblée générale début juillet. Désormais, les dirigeants d'Air France-KLM jugent que l'annonce sera probablement retardée de plusieurs semaines, «le temps que les débats deviennent moins passionnés».
En interne, la tournure politique prise par le dossier choque. Bernard Pedamon, le représentant des pilotes au conseil d'administration d'Air France se dit «surpris et mécontent». «Ces choix sont les plus stratégiques qui puissent être pour une compagnie aérienne. C'est un engagement pour une vingtaine d'années qui doit répondre à des considérations économiques, souligne-t-il. À l'heure actuelle, nous assistons au retour de nos vieux démons. L'époque où l'on pouvait faire entrer des directeurs de cabinet à la tête de l'entreprise ou bien imposer des choix d'avions est une époque révolue. »
À l'heure actuelle, le poids des deux constructeurs aéronautiques dans la flotte de la compagnie tricolore n'est pas identique. Sur l'ensemble de ses appareils long-courriers, Air France totalise 63 Boeing, contre 35 Airbus. La compagnie a en effet acheté de nombreux Boeing 777-300 à une époque où Airbus n'avait pas de modèle équivalent. En revanche, l'ensemble de ses moyen-courriers (soit 153 appareils) sont des Airbus.
La polémique des derniers jours est d'autant plus surprenante que, depuis plusieurs mois, les responsables de la flotte d'Air France ont exprimé leur intention de panacher Airbus A350 et Boeing 787. «Les arguments étudiés par nos équipes pour l'achat de ces appareils ne sont pas faits sur un coin de table», précise un cadre de la compagnie. «Nous étudions de nombreux critères : le choix des moteurs, le coût d'entretien, la répercussion sur notre activité de maintenance…» Des considérations assez éloignées des thèmes de campagne.