En plein débat sur la desserte aérienne, la Chambre territoriale des comptes avance des éléments militant en faveur d’une ouverture du ciel calédonien à la concurrence. En contrepartie, Aircalin doit définir une nouvelle stratégie.
En plein débat sur la desserte aérienne, la Chambre territoriale des comptes avance des éléments militant en faveur d’une ouverture du ciel calédonien à la concurrence. En contrepartie, Aircalin doit définir une nouvelle stratégie.
L’ombre d’un virage majeur se dessine dans le ciel calédonien. À l’heure où une nouvelle compagnie, Pacific Link, envisage de se poser bientôt sur le Caillou avec sa politique de bas tarifs, où des hôteliers en peine réclament « une saine concurrence » entre les nuages, et où le président du gouvernement affirme sa volonté de repenser en profondeur le transport aérien, la Chambre territoriale des comptes jette un pavé dans la mare. Son rapport d’observation provisoire sur l’Agence pour la desserte aérienne de la Nouvelle-Calédonie, l’Adanc, que les Nouvelles Calédoniennes ont réussi à se procurer, affiche une position claire. « Pour préserver sa compagnie aérienne et, en définitive, rentabiliser son investissement, il conviendrait que la Nouvelle-Calédonie fasse évoluer son dispositif de desserte en préparant cette société à la concurrence et à la baisse des prix. » La recommandation est livrée : ouvrir le ciel.
Plusieurs éléments avancés par la Chambre concourent à la rédaction de cet avis. En tout premier lieu, le plan adopté par Aircalin semble arriver en bout de course. L’acquisition des deux Airbus A330-200, en 2002, avait été décidée par le territoire afin de doubler le nombre de touristes venus du Japon. Lourd échec. Les voyageurs nippons ont été 31 000 en 2000, puis 20 000 en 2008, et 19 000 l’an passé.
Mise en place pour financer l’achat des appareils, l’Adanc, structure à l’activité uniquement financière dont la seule ressource est la taxe sur le fret aérien, pourrait de fait naviguer entre deux eaux. « Les perspectives montrent qu’en 2022, selon l’hypothèse la plus probable, la situation budgétaire de l’agence pourrait varier entre un déficit de 4 milliards de francs et un excédent de 2 milliards de francs » pointe la CTC qui, ainsi, « estime que le financement de l’agence n’est pas assuré, et qu’un suivi de sa situation est nécessaire ».
Une hypothèse de moins en moins théorique.
Plus encore, le déficit d’exploitation sensible d’Aircalin sur ses lignes japonaises a conduit la compagnie « à augmenter ses prix sur ses lignes vers l’Australie et la Nouvelle-Zélande », destinations les plus rentables. Cet objectif de présenter des comptes équilibrés a pu être atteint… du fait de l’absence de concurrence sur ces tronçons australiens et néo-zélandais, et ce « dans la mesure où Aircalin a noué des partenariats avec Qantas et Air New-Zealand ».
Mais voilà, un sentiment est de plus en plus partagé sur le territoire face à des tarifs jugés trop chers. Ces prix du transport aérien handicaperaient le développement touristique et économique. Le sujet peut être également abordé sous le chapitre social, « le niveau élevé des prix évinçant du voyage une partie des Calédoniens » suppose la Chambre. Des pressions se font en effet fortes. Lors des négociations portant sur l’accord aérien franco-australien prévues dans le courant de l’année 2010, l’Australie ne manquera pas d’insister en faveur d’« une ouverture plus large de son ciel à la concurrence ». Plus globalement, la probabilité d’une telle option dans l’azur calédonien « apparaît comme une hypothèse de moins en moins théorique. Elle pourrait, en effet, générer une baisse des prix, une augmentation du trafic, l’apparition de nouvelles compagnies sur le territoire, et répondrait, de plus, aux souhaits de l’Australie et à ceux de l’opinion calédonienne ».
Reste que l’introduction d’une concurrence porterait un sérieux coup aux lignes d’Aircalin les plus rentables, société qui aurait ainsi bien du mal à équilibrer ses résultats. La compagnie à l’hibiscus doit donc se préparer, une nouvelle stratégie doit être arrêtée par l’ensemble des acteurs. Le temps est à la réforme.
Source : Les nouvelles calédoniennes – Yann Mainguet et Philippe Frédière – 07 mai 2010