A. de JUNIAC vient d’annoncer sa démission du poste de PDG d’Air France KLM, démission effective au 1er août prochain. S’agissant de son bilan, il a déclaré avoir rempli la mission assignée par le Conseil d’administration, à savoir ramener la maison à l’équilibre et la désendetter. Cette affirmation est à la fois réductrice et exagérée.
Réductrice, parce que ce qui restera de la Direction d’A.de Juniac, c’est d’abord et avant tout la profonde dégradation du dialogue social à AF. Au-delà de son autisme face aux demandes des Organisations de toutes les catégories du personnel, la Direction n’aura eu de cesse de les opposer entre elles, avec comme point d’orgue l’organisation de manifestations « spontanées » de membres du Personnel anti-PNT lors de la grève de septembre 2014. Le PNC aura, quant à lui, subi une communication d’entreprise sans précédent via des boards obligatoires où la hiérarchie alterne culpabilisation sur nos conditions de travail, peur de la faillite, des licenciements massifs et doute sur la capacité d’AF à continuer de payer les salaires … Ne parlons pas enfin des Représentants du personnel pas informés/désinformés découvrant dans la presse la moindre option stratégique de l’Entreprise…
Exagérée, car A. de JUNIAC ne peut se targuer d’avoir réalisé le retour aux bénéfices d’Air France. Celui-ci trouve son origine dans deux facteurs : la chute du prix du baril et surtout la responsabilité des Organisations syndicales qui ont accepté de réaliser Transform 2015. Contrairement à ce qu’a déclaré A. de Juniac, lors de sa célèbre intervention à l’Abbaye de Royaumont en mars 2015, les troupes ont un degré de conscience : les syndicats, et surtout les PNC par voie de référendum que nous avons organisés, ont accepté des efforts de productivité de 20 %. Avec pour seul remerciement de la Direction que celle-ci revienne sur sa parole de ne plus demander d’efforts de productivité.Air France sous la Direction d’A. de JUNIAC, c’est 10.000 suppressions d’emplois. Mais c’est aussi une absence de vision, d’ambition et une réelle volonté d’attrition de notre activité. Le PDG d’AF-KLM n’en avait pas fait mystère à Royaumont : pour lui, « le coût du travail constitue la seule variable d’ajustement ». Une telle philosophie limite les grands desseins.
Enfin Air France sous A. de Juniac c’est via les épisodes de la chemise (qu’on ne saurait mettre sur le dos de casseurs syndicaux) et tout récemment de la réouverture des vols Téhéran, une image dégradée dans le monde : celle d’une Compagnie sans dialogue social et un peu mercenaire, prête à tout pour satisfaire le client.
Concluons sur l’homme qui laissera l’image d’un patron ultra libéral totalement décomplexé. Au-delà de ses dérapages à Royaumont (travail des enfants, acquis sociaux), il aura développé une thématique – les insiders contre les outsiders (titulaires d’un emploi contre chômeurs), les premiers pouvant à tout moment rejoindre les seconds.
Et légère parenthèse vers l’actualité, c’est cette thématique qui est aujourd’hui développée à l’occasion de la Loi EL KHOMRI, et qui justifie des efforts salariaux sans fin.
Nous perdons enfin un patron tourné entièrement vers l’accroissement du capital, de la rentabilité, de la marge, estimant n’avoir aucun devoir vis-à-vis de la France, de l’emploi et de la protection sociale dans notre pays. Outre les 10.000 suppressions d’emplois précitées, n’oublions pas son acharnement à délocaliser l’emploi là où les conditions de travail et de rémunération sont les plus basses.
Souhaitons bon vent à A. de JUNIAC et espérons qu’il se borne désormais
à développer ses « belles idées » lors de conférences en milieu conquis.