Le secteur du transport aérien français peine à se diversifier. Deux compagnies, Blue Line et Strategic Airlines, doivent laisser leurs avions au sol et arrêter leurs activités. Une centaine de pilotes et quatre fois plus d'hôtesses et de stewards sont concernés. Ces "crashes" simultanés ne sont pas liés à la concurrence des low cost, aux pertes causées par le volcan islandais, ou encore à la crise financière, mais à la difficulté de faire vivre une compagnie aérienne, surtout une microstructure, sans être épaulé par un groupe plus puissant qui peut répondre aux appels ponctuels de trésorerie.
Le secteur du transport aérien français peine à se diversifier. Deux compagnies, Blue Line et Strategic Airlines, doivent laisser leurs avions au sol et arrêter leurs activités. Une centaine de pilotes et quatre fois plus d'hôtesses et de stewards sont concernés. Ces "crashes" simultanés ne sont pas liés à la concurrence des low cost, aux pertes causées par le volcan islandais, ou encore à la crise financière, mais à la difficulté de faire vivre une compagnie aérienne, surtout une microstructure, sans être épaulé par un groupe plus puissant qui peut répondre aux appels ponctuels de trésorerie.
Créée en 2002 par Xavier Remondeau, Blue Line exploitait une niche originale du marché de l'affrètement, celle des vols d'incentive, c'est-à-dire les voyages de groupes organisés par les entreprises pour former ou récompenser leurs salariés. Le transporteur était affrété notamment lors des grandes opérations de relations publiques des constructeurs automobiles à l'occasion des lancements de nouveaux modèles. Autre cible, les grands chefs d'orchestre en tournée et même certains gouvernements lors de leurs déplacements. La moitié des avions de la flotte disposait d'une cabine VIP. L'équipe de France de foot était partie en Afrique du Sud sur un de ces appareils luxueux… avant de rentrer à bord d'un avion charter haute densité d'une compagnie qui transporte aussi du fret la nuit. Les Bleus volaient encore Blue Line lors du match de l'Euro 2012 à Sarajevo.
Modèle d'avion unique
Mais la volonté d'offrir des avions de 100 à 250 sièges n'est pas compatible avec la saine gestion d'une petite compagnie. Blue Line, qui comptait huit avions de trois modèles différents (Fokker 100, MD 82 et Airbus A310), ne respectait pas la règle de base du transport aérien du modèle d'avion unique. En son temps, à une autre échelle, cela avait causé les difficultés d'Air France qui alignait des types nombreux d'avions, dont certains venus d'UTA et d'Air Inter. Les coûts opérationnels à Blue Line sont multipliés par trois, car, à chaque fois, il faut maintenir à niveau une population différente de pilotes, d'ingénieurs et de techniciens de maintenance. Il faut aussi tripler les pièces détachées. Par exemple, un moteur en stock, disponible pour un dépannage, serait supportable pour une flotte de huit avions semblables. Mais, ici, ce seront trois moteurs différents qu'il faut financer, à dix millions de dollars pièce !
Le 6 septembre, le tribunal de commerce de Pontoise prononçait la liquidation de la compagnie avec poursuite de l'exploitation jusqu'au 6 octobre. Une reprise est peu probable, car les actifs sont limités. Les avions anciens, gourmands en carburant, sont peu cotés. Compagnie charter, Blue Line n'a pas de réseau, donc pas de droits de trafic internationaux, ni de créneaux dans les aéroports qui auraient pu être monnayés. Restent les équipages et le personnel au sol qui peuvent tenter leur chance au Moyen-Orient, là où les compagnies aériennes recrutent.
Double incident de Strategic Airlines
Concernant Strategic Airlines, son certificat de transporteur aérien vient à échéance le 15 septembre. La Direction générale de l'aviation civile ne souhaite pas le renouveler, la compagnie ne répondant pas aux normes demandées. La direction de Strategic Airlines, contactée par Le Point.fr, reconnaît que des réponses documentaires lui ont été demandées par l'aviation civile, mais jure que la sécurité des vols est assurée. Les vols prévus ces prochaines semaines – 200 heures par avion et par mois – pourraient impacter les programmes des voyagistes qui ont affrété cette compagnie.
Le double incident de Lyon, le 11 juillet dernier, du vol STZ 621 de la compagnie Strategic Airlines à destination de Ténériffe – et surtout sa manière de le gérer – a certainement été le déclencheur de ce non-renouvellement du certificat de transporteur aérien. Affrété par Fram, le vol n'avait pu partir le samedi matin à la suite d'un problème de circuit hydraulique. Le dimanche matin, c'est une fissure détectée sur le pare-brise et nécessitant son remplacement qui a de nouveau retardé le départ de l'avion. Les deux A320 de la compagnie sont parmi les premiers construits et avaient volé autrefois aux couleurs d'Air Inter.
Strategic Airlines, filiale d'une start-up australienne qui a remporté les contrats de transport du personnel de l'armée australienne lors de ses opérations extérieures (Moyen-Orient, Afghanistan), a obtenu son autorisation de vol le 13 août 2009. Elle voulait s'attaquer tant aux dessertes charter moyen-courrier que long-courrier, avec un Airbus A330 annoncé pour cet hiver. Le modèle économique d'une microcompagnie aérienne reste à inventer.
Source : LePoint.fr – Thierry Vigoureux – 13 septembre 2010