Le SNPNC souhaite vous faire partager les premiers résultats de son enquête pénibilité menée au cours de l’été 2014. Notre approche a pour finalité première le repérage des situations de pénibilité au travail spécifiques au métier de PNC et au-delà, leurs conséquences sur notre santé. Ainsi nous entendons obtenir par notre démarche consultative, qu’un compte personnel de prévention de la pénibilité soit ouvert aux PNC en apportant la preuve que nous sommes bien exposés à au moins un des 10 facteurs de pénibilité* prévu par la loi.
Nous tenons à remercier les 2500 PNC (1900 AF et 600 autres Compagnies) qui ont participé à cette enquête. Les résultats recueillis sont suffisamment probants et importants par le nombre, pour nous permettre d’être reçus par les pouvoirs publics afin de défendre notre cause et de faire enfin reconnaître la pénibilité du métier de PNC auprès du gouvernement.
Pénibilité et processus législatif : où en est le gouvernement ?
Compte de prévention de la pénibilité : le Gouvernement juge qu’il est urgent d’attendre : on sait qu’à la suite de la menace de fin juin 2014 du Medef de boycotter la Conférence sociale si le compte pénibilité n’était pas revu, le Premier Ministre Manuel VALLS a annoncé le 2 juillet un report partiel à 2016 de la mise en place du compte pénibilité. Les projets de décret ont été modifiés, les entreprises étant tenues de mesurer l’exposition des salariés à seulement 4 – travail de nuit, travail en équipes successives alternantes, travail répétitif, activités exercées en milieu hyperbare, des 10 facteurs de pénibilité prévus. Devant la nouvelle fronde des syndicats d’employeurs (Medef, CGPME, UPA) ayant manifesté le 1er décembre à Paris, le 1er Ministre a rappelé dans un communiqué du 8 janvier 2015, que « les entreprises concernées par les 4 facteurs de pénibilité entrant en vigueur en 2015 […] -soit une petite minorité des entreprises françaises- n’ont à ce stade aucune tâche ou formalité supplémentaire à accomplir au titre du compte. Aucune obligation déclarative n’est à accomplir avant le mois de janvier 2016 ». Enfin, le Gouvernement a mis en place deux missions de conciliation, l’une pour formuler d’ici juin 2015 des propositions permettant d’améliorer et de simplifier le dispositif, l’autre pour appuyer les branches professionnelles pour l’élaboration de leurs modes d’emplois et de préparation de la mise en œuvre de l’ensemble des facteurs de pénibilité le 1er janvier 2016. Stand-by, donc…
Compteur pénibilité : comment ça marche ?
Tous les salariés exposés à des facteurs de pénibilité doivent bénéficier d’un compte personnel de prévention de la pénibilité. Chaque trimestre d’exposition à un facteur de pénibilité ajoute un point au compte ou deux points en cas d’exposition à plusieurs facteurs. Les points pourront être convertis :
– en temps de formation pour sortir d’un emploi exposé à la pénibilité
– en passage à temps partiel en fin de carrière avec maintien de rémunération
– en trimestres de retraite
Chaque tranche de 10 points rapporte un trimestre. Les 20 premiers points sont obligatoirement utilisés pour la formation. Les salariés qui sont aujourd’hui trop proches de la retraite pour avoir le temps d’accumuler suffisamment de points bénéficieront d’un doublement de leurs points, et ils ne seront pas obligés de les utiliser pour des formations.
Parmi les 10 critères de pénibilité établis par le gouvernement, ceux retenus par le SNPNC nous ont permis d’établir le questionnaire que nous vous avons soumis. Les données recueillies nous permettent d’analyser plus finement votre vécu et votre ressenti au quotidien. Ces résultats sont compilés dans un document de synthèse à destination du gouvernement afin d’étayer nos demandes. NB : En plus du travail de nuit nous avons ajouté le décalage horaire, critère aggravant la pénibilité du métier PNC.
Au titre des contraintes physiques marquées :
« a) Les manutentions manuelles de charges définies à l’article R. 4541-2 ;»
« b) Les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;»
« c) Les vibrations mécaniques mentionnées à l’article R. 4441-1 ;»
Au titre de l’environnement physique agressif :
« a) Les agents chimiques dangereux mentionnés aux articles R. 4412-3 et R. 4412-60, y compris les poussières et les fumées ;»
« b) Les activités exercées en milieu hyperbare définies à l’article R. 4461-1 ;»
« c) Les températures extrêmes ;»
« d) Le bruit mentionné à l’article R. 4431-1 ;»
Au titre de certains rythmes de travail :
« a) Le travail de nuit dans les conditions fixées aux articles L. 3122-29 à L. 3122-31 ;»
« b) Le travail en équipes successives alternantes ;»
« c) Le travail répétitif caractérisé par la répétition d’un même geste, à une cadence contrainte, imposée ou non par le déplacement automatique d’une pièce ou par la rémunération à la pièce, avec un temps de cycle défini. »
RÉSULTATS DU QUESTIONNAIRE (exprimé en pourcentage)
RÉSULTATS EN LIEN AVEC LES CRITERES DE PÉNIBILITÉS DICTÉS PAR LE GOUVERNEMENT
1. Questions relatives au sommeil et à la fatigue en lien avec les critères du travail posté :
88%déclarent être fatigués
52%ont pris ou prennent des médicaments pour dormir
60% souffrent de troubles du sommeil liés au décalage / levés tôt
Ce que dit la loi :
Le travail posté, comme les 3×8, les 2×8 , les 2×12, fait partie des organisations temporelles atypiques et inclut souvent un poste horaire de nuit.
Ce que disent les autorités médicales :
1. Etude Billard 2004 : 40 à 80% des travailleurs de nuit rapportent des troubles du sommeil et de l'éveil.
2. Médecine du travail Air France : dans son rapport technique de 2004, indique que " le travail de nuit ou en horaire décalé contribue à créer une dette de sommeil. Cette dette dégrade de façon évidente les fonctions physiologiques, sensorielles ou mentales".
3. Société Française de Recherche de la Médecine du Sommeil : Le professeur Permaty, médecin généraliste du sommeil écrit au sujet des voyages intercontinentaux : " au-delà de quatre voyages par an, l'horloge interne ne comprend plus rien".
QUEL EST LE LIEN ENTRE LE TRAVAIL POSTÉ ET LES PROBLEMES DE MÉMOIRE ?
66%des PNC sondés souffrent de problèmes de mémoire
Selon Lance Kriedgsfelt, professeur agrégé de l'Université de Berkeley, "que vous soyez steward, interne en médecine ou que vous fassiez les 3×8, les perturbations répétées du rythme circadien ont de grandes chances d'avoir un impact à long terme sur votre comportement cognitif et sur les fonctions cérébrales." Il indique aussi que les effets du décalage horaire sont sérieux pour les personnels navigants: troubles de l'apprentissage, troubles de la mémoire et temps de réaction plus longs.
Un groupe de chercheurs anglais de l'université de Durham a mené une expérience auprès de femmes travaillant pour une Compagnie aérienne. L'objectif était d'observer les temps de réaction de ces femmes en les répartissant sur trois groupes d'activité : sol, vols domestiques et vols intercontinentaux. Les résultats de l’étude ont montré que les femmes du dernier groupe avaient des temps de réactions plus longs que celles qui effectuaient des vols domestiques. Elles-mêmes étaient plus touchées que leurs collègues travaillant au sol. Cette expérience nous apprend aussi que les navigants qui effectuent des vols internationaux avec un décalage horaire supérieur ou égal à 3 heures pendant plus de 4 ans souffrent de troubles de la mémoire. Pour annuler cet effet, il faudrait espacer chaque vol intercontinental d'une période de repos de 14 jours.
QUEL EST LE LIEN ENTRE LE TRAVAIL POSTÉ ET LA GROSSESSE, LA MATERNITÉ ?
6 %des hôtesses ont rencontré des problèmes d’ovulation de dysovulation ou de stérilité
9%des hôtesses ont déclaré avoir fait une fausse couche
Ce que disent les études médicales : Les femmes sont moins souvent enceintes et le nombre d'avortements spontanés est augmenté (études Costa 1996, Bisanti & Al 1996, BEST 2000)
2. Question relative aux maladies cardio-vasculaires.
2,4% souffrent ou ont souffert de maladie cardio-respiratoire
Ce que disent les études médicales : Les risques de maladies cardiovasculaires sont augmentés de 40% par rapport aux travailleurs non exposés au travail posté (Etude Akerstedt 1997).
3. Question relative aux cancer
4%ont déjà eu un cancer<
Ce que disent les études médicales : Elles dénombrent cinq types de cancers les plus fréquemment rencontrés par notre population :
- Etude Kubbo 2006 : le cancer de la prostate est relevé avec un risque accru chez le personnel navigant masculin.
- Nurses' health study 2003 : le cancer colorectal est mis en évidence dans l'étude de Schernhammer. Il suffit d'une exposition de 3 nuits par mois pendant plus de 15 ans pour être exposé à ce type de cancer.
- Etude Lahti de 2008 : le lymphome malin non hodgkinien (cancer du système immunitaire). Ici, l'étude indique qu'une exposition au décalage horaire supérieure à 10 ans et en continu augmente le risque de le développer.
- Le cancer du sein : en 1995, Pukkla et Al constatent une augmentation de l'incidence du cancer du sein chez le personnel navigant.
– En 2005, l'étude Cécile de l'INSERM met en évidence le lien entre ce cancer et le travail de nuit.
– Le CIRC a confirmé un risque accru de l'ordre de 30% chez les hôtesses de l'air. L'exposition au travail posté de nuit est classé 2A par cet institut.
– En 2009, le gouvernement danois a indemnisé 40 travailleuses de nuit ayant développé un cancer du sein. Elles avaient toutes exercé plus de 20 ans en travail posté… Des hôtesses de l'air en faisaient partie ! - Le cancer de l’endomètre (utérus): voici ce que dit Stéphane Noel (Fédération des maisons médicales et des collectifs de santé francophone): " Le risque de cancer de l'utérus augmente après plus de 20 ans de travail de nuit et encore plus s'il est associé à un excès pondéral". En 2007, l'étude de Wiswanathan et Al relève un risque du cancer de l'endomètre suite à une exposition de 3 nuits par mois pendant 20 ans.