Après le jeu de chaises musicales politiques qui a conduit au report de l’assemblée générale d’Air Austral et qui s’est semble-t-il calmé (voir encadré) on aurait pu penser que la compagnie réunionnaise sortirait mardi prochain à l’issue de son assemblée générale des turbulences. Il n’en est rien. Un nouveau front vient de s’ouvrir, cette fois à l’intérieur même de l’entreprise.
Comme le code du travail l’y autorise, le comité d’entreprise de la compagnie vient de lancer, non pas un audit mais une expertise en profondeur de la société. Dans les années 90, une telle procédure avait déjà été engagée. Au sein du comité d’entreprise d’Air Austral, la décision mûrit depuis un an. La dégradation des relations entre la direction et les représentants du personnel ont précipité les choses. Le comité d’entreprise d’Air Austral a fait appel à une pointure en la matière, le cabinet Syndex. Fondé au début des années 70, il s’est bâti une solide réputation en matière d’expertises économiques, financières et sociales. Ses 350 consultants réalisent plus de 2 000 interventions par an dans des secteurs aussi différents que le nucléaire, l’agroalimentaire, la banque, les bâtiments et les travaux publics et bien sûr le transport et la logistique et la liste n’est pas exhaustive.
un véritable diagnostic de la compagnie
La procédure est désormais sur les rails. Lors d’une réunion, du comité d’entreprise ses membres ont officiellement désigné le cabinet Syndex. Son intervention comme le prévoit le code du travail sera à la charge de la compagnie. Syndex a d’ores et déjà adressé sa lettre de mission, établie en concertation avec le comité d’entreprise, à ce dernier et à la direction.
Les investigations iront bien au-delà d’un simple examen approfondi des comptes de l’entreprise. Le cabinet va réaliser un véritable diagnostic d’Air Austral. Il va s’intéresser à sa structure financière, à ses investissements, à ses modes de financement, aux conditions d’emplois et aux rémunérations, à son positionnement par rapport à la concurrence, à sa stratégie.
En clair, la compagnie va être mise à nue. Les consultants de Syndex disposent de moyens d’investigations très étendus qui s’apparentent à ceux des commissaires aux comptes. La direction de l’entreprise a l’obligation de répondre à ses demandes. Syndex remettra son rapport, confidentiel, au début de l’année prochaine. Du côté de la direction d’Air Austral on affiche une certaine sérénité. Dans une note à l’attention de l’ensemble du personnel, Gérard Ethève, président du directoire et directeur général de la compagnie, affirme : “Air Austral est une entreprise transparente qui ne craint aucun audit externe, ni contrôle fiscal de quelque nature que ce soit. Les auditeurs seront donc reçus sans aucun problème et avec urbanité.”
Source : Clicanoo.com – Alain Dupuis – 30 octobre 2010
Air Austral : Quand Gérard Ethève parle vrai…
Les personnels d’Air Austral, tout autant que ses actionnaires, les Réunionnais, via la SEMATRA et via les conseils régional et général, que ses usagers, via les tarifs particulièrement élevés, ont contribué à la réussite de cette entreprise que son PDG s’approprie comme jadis un seigneur s’appropriait son fief. Quand il se vante et présente comme un critère, « exceptionnel en France », de démocratie, la participation des salariés à hauteur de 13% du
capital, il évite de signaler le caractère manipulateur de cette opération. Par le biais de la SAS Réunion Aéro Investissement ( dont il est le président et le seul maître à bord ), visait en premier lieu à mettre fin à un portage coûteux par le crédit agricole des parts non encore vendues d’Air France. En second lieu, à s’arroger directement personnellement la représentation de ces 13% de parts en « imposant » aux personnels actionnaires, « de donner pouvoir à Gérard Ethève, président de Réunion Aéro Investissement » pour « LES » représenter, comme me l’ont confirmé bon nombre d’entre eux «bidonnés » par le tour de passe-passe d’Ethève pour garder la main sur la compagnie.
Que « 99% des personnels soient fiers et motivés de travailler chez Air Austral », dans une île aux 150 000 chômeurs pour 820 000 habitants, dont une très grande majorité de jeunes diplômés et formés, aux 52% de familles vivant sous le seuil de pauvreté, n’est-ce pas naturel et parfaitement légitime ? S’attribuer « ensemble… des résultats et une qualité de service reconnue… et NOTRE succès face à une concurrence meurtrière » n’est-ce pas un abus des mots « ensemble » et « notre », surtout quand on connaît les réalités de la gestion, sociale et humaine, et de la gouvernance de cette entreprise par son PDG autoritaire et despotique, patron de choc comme l’atteste l’histoire de la compagnie ?
Non monsieur le PDG, l’audit du CE d’Air Austral, si longtemps et toujours opaque dans les mains de quelques-uns, ne saurait être une dépense inutile. Espérons qu’il permettra de rendre aux salariés, aux actionnaires, aux Réunionnais, une vision transparente de la gestion et la gouvernance d’une entreprise, outil déterminant pour le tourisme, pour la continuité territoriale, pour la contribution de TOUS les Réunionnais, et non plus que la Réunion d’en Haut actionnaire, au développement économique de leur île, pour la création des milliers d’emplois auxquels ils aspirent, surtout les jeunes formés en pleine désespérance.
Source : Médiapart – Antoine Franco – 30 octobre 2010