La chambre régionale des comptes a embarqué à bord de CCM-Airlines pour examiner la gestion de la compagnie aérienne régionale Corse-Méditerranée entre 2001 et 2008.
La chambre régionale des comptes a embarqué à bord de CCM-Airlines pour examiner la gestion de la compagnie aérienne régionale Corse-Méditerranée entre 2001 et 2008.
Les observations définitives de l'institution ne constituent en rien un catalogue de critiques virulentes. Il n'y a pas de dysfonctionnement flagrant, mais quelques anomalies dans le fonctionnement de l'entreprise qui ne la mettent pas pour autant en danger, même si la situation économique est jugée globalement fragile.
Critique sur l'acquisition des ATR.
La chambre relève en premier lieu un manque de transparence dans les conditions de rémunération et d'attribution d'avantages aux présidents successifs. Elle souligne le rôle « trop limité » du conseil d'administration et du conseil de surveillance dans les conventions, pourtant capitales, signées avec Air France, l'élaboration du projet d'entreprise, les achats d'avions, l'ouverture de lignes, etc. « L'observation la plus significative dans ce domaine concerne la procédure d'acquisition en 2005 de six nouveaux ATR pour un montant de près de 90 ME. Ces ATR ont été rétrocédés à une société écran dont le siège est aux îles Caïmans qui en reste propriétaire pendant 10 ans, jusqu'à échéance des paiements ».
L'examen de l'activité de l'entreprise dans le cadre des OSP (obligations de service public) fait apparaître une certaine complexité en raison d'un trop grand nombre de conventions (52) entre la compagnie et la collectivité territoriale, cette dernière ne disposant pas d'informations suffisantes dans le cadre des conventions de délégation de service public. « La chambre n'a pas pu obtenir de la CCM des comptages fiables de passagers, sous le régime de l'aide sociale ».
Revoir le partenariat avec Air France
La juridiction financière estime justifiées les aides attribuées à la compagnie : « Sans subvention, il faudrait un taux de remplissage supérieur à 100 % sur les lignes de bord-à-bord pour que l'équilibre d'exploitation puisse être assuré ». Elle observe toutefois que l'augmentation de ces compensations (de 17 ME en 2002 à 51 ME en 2008) est « supérieure à celle enregistrée lorsqu'elle est ramenée à l'offre de sièges ou au nombre de passagers, même en tenant compte de l'évolution des prix ». Et que pour le bord-à-bord, « la subvention versée par passager social était plus élevée que la part du billet restant à la charge du voyageur ». Ce n'est pas le cas pour la liaison de service public avec Paris. S'agissant des achats, les procédures de choix et de mise en concurrence manquent de transparence. Le rapport cite les dépenses d'affrètement, de location et de maintenance d'appareils ou de prestations de nettoyage.
Par ailleurs, si la compagnie aérienne maîtrise bien ses charges, elle suggère la « remise à plat » des relations contractuelles avec Air France, complexes et déséquilibrées, « notamment au niveau des commissions prélevées par Air France ».
Un taux d'absentéisme trop élevé
L'évolution des effectifs paraît mieux maîtrisée que par le passé, « mais l'augmentation importante du salaire moyen annuel aboutit à une forte progression du coût de personnel ». D'autre part, le taux d'absentéisme est trop élevé, atteignant 20 % pour les personnels navigants. La chambre encourage vivement l'entreprise à prendre des mesures pour rétablir la situation. Toutefois, ce taux d'absentéisme est courant dans le monde des compagnies aériennes et, en la matière, d'autres organismes comme les médecins-contrôleurs de la sécurité sociale peuvent aussi agir.
CCM-Airlines a pu être aussi un peu trop généreuse dans sa gestion des billets à gratuité partielle. Les juges financiers l'incitent à davantage de maîtrise, et préconisent de développer une démarche qualité « en prenant sérieusement en compte les attentes de la clientèle ».
Globalement, la situation financière de l'entreprise ne connaît plus de trous d'air, mais elle n'est pas pour autant à l'abri de nouvelles turbulences. Le chiffre d'affaires commercial a enregistré une forte progression (plus 65 % sur la période examinée). Mais faute de capacité d'autofinancement suffisante, la CCM a dû puiser sur ses réserves et emprunter. « Les fonds propres ne représentent plus que 25 % des capitaux permanents en 2008 contre 45 % en 2002. Un ratio préoccupant. La trésorerie est aussi très tendue… »
En conclusion, la chambre régionale des comptes subordonne la pérennité de la compagnie régionale à deux conditions : un effort de rentabilité « pour se prémunir contre une concurrence plus aiguë qui reste toujours possible », et un meilleur équilibre dans le partenariat avec Air France. Des critiques mesurées et constructives susceptibles de rassurer le futur président qui se trouvera en assez bonne compagnie… Source Corse-Matin, 18 mai 2010